Lettre du président du Conseil canadien des Églises sur le mariage homosexual

UN FORUM DE RÉFLEXION ŒCUMÉNIQUE SUR LE MARIAGE HOMOSEXUEL
La question du ” mariage homosexuel ” fait partout l’objet d’un débat intense et conflictuel. Plutôt que de se tenir à l’écart, beaucoup de nos Églises chrétiennes s’attaquent au problème. C’est d’elles, bien plus encore que des législateurs, qu’on exige une prise de position publique sur le ” mariage homosexuel “; ce problème met en cause des doctrines de vérité chrétiennes tout comme des questions d’ordre pastoral entourant le souci du peuple de Dieu. Il s’agit ici de déterminer ce qu’une Église sanctifiera, tiendra pour sacré aux yeux du monde. Jésus ne disait-il pas : ” Que votre lumière brille aux yeux des hommes, pour qu’en voyant vos bonnes actions, ils rendent gloire à votre Père qui est aux cieux “? (Matt 5.16). Le mariage est l’une des précieuses actions de la vie humaine que l’Église sanctifie. Dans cette conjoncture, les Églises chrétiennes pourraient s’attendre à un énoncé de position sur le mariage homosexuel de la part du Conseil canadien des Églises. Or, tout ce que le Conseil peut affirmer, c’est qu’aucune déclaration à ce sujet n’est actuellement possible et qu’il n’en sera fait aucune. La raison de cette attitude tient de la nature même du CCE. Celui-ci fonctionne toujours en mode de forum, c’est-à-dire que les Églises membres du CCE apportent à la table de discussion Œcuménique leurs propres voix individuelles pleines et entières; chacune d’entre elles accepte la valeur du principe selon lequel, avant de rechercher une position commune des Églises, chaque Église doit d’abord atteindre individuellement à la vérité par l’intermédiaire de sa propre théologie et enseigner ses propres doctrines conformément à son propre processus décisionnel officiel. Nous espérons parvenir ainsi, dans un esprit d’Œcuménisme, à une harmonie et un consensus entre les positions de toutes les Églises; notre souci Œcuménique du bien d’autrui, élément capital du Forum, qui rassemble les Églises en un organe Œcuménique de pointe, implique qu’en certaines matières, il nous faudra admettre que les Églises puissent être en désaccord, et l’être parfois profondément; en pareils cas, il ne saurait y avoir de ” voix du CCE “. Si les divergences de vues et le débat qui en résultent sont toujours frustrants, voire parfois très pénibles, ils sont honnêtes et sincères et aident les Églises à s’acquitter de leur mission historique, qui les appelle à la sagesse et à l’humilité. Le ” mariage homosexuel ” compte parmi ces pénibles objets de controverse. Il s’agit, pour les chrétiens, de discerner l’Esprit de vérité et d’exposer assez clairement le message salvateur de Dieu pour que tous puissent reconnaître l’image de Dieu et s’y raccrocher fermement. C’est ce que font les Églises qui bénissent le mariage homosexuel, tout comme celles qui s’y opposent. Toutes les Églises membres du CCE ont fait des efforts sincères et empreints de piété pour comprendre la volonté de Dieu à ce sujet. ” Quand vous parlez, dites ‘Oui’ ou ‘Non’ “, nous enseigne Jésus (Matt 5.37). Certaines Églises ont opté pour un ‘Oui’ au mariage homosexuel à la lumière de leurs réflexions; le choix du ‘Non’ par d’autres Églises est né d’une réflexion tout aussi profonde et pieuse. Quelle que soit l’intensité du débat sur la Vérité chrétienne appropriée à ce sujet – et nous avons tous beaucoup à apprendre en nous écoutant attentivement les uns les autres – il faut que chacun accueille la pieuse sincérité dont s’est inspirée la prise de position d’autrui avec le même amour fraternel qu’il espère en retour (Matt 22.39). Nous aspirons tous à ” entrer par la porte étroite ” (Matt 7.13). On ne saurait trop le souligner, car la tentation est vive de s’enorgueillir d’une prise de décision sur un sujet aussi délicat; nous tendons tous à croire, en effet, que les autres se trompent, puisque que c’est nous qui avons raison. Plus grave encore serait la tentation de diaboliser l’adversaire, de prétendre, d’une part, que la décision de favoriser le mariage homosexuel est héroïque et que s’y opposer s’avère peu cher et facile, qu’il s’agit d’une simple réaction épidermique reposant sur de vieux préjugés, voire pis encore. D’autre part, ceux qui portent le jugement opposé sont également tentés d’affirmer – et nous l’entendons, hélas! trop souvent – que la décision d’une Église de bénir le mariage homosexuel n’est qu’une adaptation facile à la mode aux mŒurs du temps. La réalité est que la position de chacune des Églises est née d’une forte dose d’introspection, d’étude approfondie et de méditation. Ajoutons que l’anthropologie chrétienne de toutes les Églises du CCE partisanes du ‘Non’ reconnaît l’humanité intégrale des homosexuels et rejette l’homophobie. Il importe de l’affirmer clairement : le débat entre les Églises porte sur la légitimité, la sainteté et le caractère sacré du mariage homosexuel (tout comme de l’acte homosexuel, pour la majorité des Églises). Il n’y a pas de débat ni de dissension au sein des Églises membres du CCE quant à la sainteté des personnes homosexuelles en tant qu’êtres individuels. On en trouve un exemple caractéristique dans la position énoncée en 1997 par les évêques anglicans du Canada : ” Nous croyons, en tant que chrétiens, que les personnes homosexuelles, en tant qu’enfants de Dieu, ont un droit entier et égal à celui des autres personnes à l’amour, à l’acceptation, aux attentions et aux soins pastoraux de l’Église. La nature même du Forum chrétien que constitue le CCE nous presse tous de garder cette réalité à l’avant-plan; lorsque nous nous expliquons aux autres et que nous les écoutons en retour, nous tâchons de garder à l’esprit la parabole de ‘la paille e t la poutre’ (Matt 7.3-5). Le triomphalisme est un péché grave. La divergence totale entre les positions des Églises à ce propos signifie cependant qu’il n’y aura pas, pour le moment, de déclaration unique du CCE sur le ” mariage homosexuel. ” Vu le large éventail de positions et de théologies parmi les Églises, il n’existe pas actuellement de possibilité de consensus au sein du CCE sur le mariage homosexuel, donc pas de ” voix des Églises “. Dans la conjoncture actuelle, les Églises agiront à titre individuel en la matière, fidèles à la mission de Vérité que Dieu leur a confiée. Pour une organisation Œcuménique telle que le CCE, qui a pour ultime objectif d’encourager la réconciliation entre les Églises séparées, cette situation est une grande source de préoccupation, comme pour tous les chrétiens sincères et fidèles, cela va de soi. Malgré l’impossibilité d’en arriver à une déclaration consensuelle, nous allons continuer, au CCE, d’aborder ce sujet dans l’esprit du Forum, nous montrant soucieux d’honnêteté tout en nous efforçant d’être constructifs. Pour le moment, nous allons promouvoir les ” gestes réalistes et possibles ” qui caractérisent notre Forum. Nous avons déjà suscité un débat théologique franc et respectueux entre les Églises à ce sujet, et nous allons certainement continuer de le faire. Ce genre de recherche théologique a pour objectif Œcuménique, non pas de tenir d’interminables débats, mais de poursuivre inlassablement notre commune recherche, afin de pouvoir discerner – à tout le moins – ce que nous pouvons apprendre les uns des autres. Nous espérons, comme tous les chrétiens, que l’avenir nous révélera clairement à tous la lumière de Dieu; nous admettons, pour le moment, que le résultat éventuel est connu de Dieu seul. Dans l’intervalle, dans l’esprit le plus constructif de tous, c’est-à-dire cette préoccupation à l’égard d’autrui dans laquelle les chrétiens reconnaissent l’Esprit saint, nous allons poursuivre le travail commun qui a déjà fait l’objet d’un consensus chrétien, poursuivant et élargissant nos Œuvres, entre autres dans les domaines, de l’aide mondiale, du maintien de la paix, de la biotechnologie et de l’anthropologie chrétienne, de la justice et de l’intervention en cas de catastrophe. Chaque décision quant au geste approprié et conforme à la volonté de Dieu qu’il faut faire devant l’angoisse suscitée par la question du mariage homosexuel comporte des coûts énormes; cela est tout aussi vrai et difficile pour les tenants du ‘Non’ que pour ceux du ‘Oui ‘. Ce que nous faisons, tous et chacun de nous, en prenant des décisions sur la vérité à ce sujet, c’est ‘nous renier nous-mêmes et prendre notre croix’ pour suivre Jésus (Marc 8.34-36). Nous devons reconnaître que chacune des Églises, quelle que soit sa position, porte sa croix en cette matière. C’est en poursuivant dans l’amour notre douloureuse quête de la vérité que nous pouvons nous aider mutuellement à porter nos croix. Je demeure, dans la confiance et l’espoir en Dieu, Le Professeur Richard Schneider Président Le Conseil canadien des Églises Pour de plus amples informations, contacter : Le Professeur Richard Schneider Président Le Conseil canadien des Églises 416 575-5488 (téléphone mobile) (OU) La Rév. Karen Hamilton Secrétaire générale Le Conseil canadien des Églises Tél. : 416 972-9494, poste 22 (Bureau) Tél. : 416 481-2128 (Résidence)

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